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Comment vérifier si un éco-volontariat est vraiment éthique ?
Esther Meunier
Esther Meunier
Voyager en donnant de son temps pour des bonnes actions = allier l’utile à l’agréable 🤘
En 2017, 40% des personnes de moins de 35 ans interrogées en France se disaient prêtes à s’engager pour effectuer des missions à l’international !
Et quand on parle d’engagement écolo, on peut parler d’éco-volontariat : partir quelque part pour contribuer à un projet lié à la protection de l’environnement (climat, biodiversité, pollution…).
Mais attention, tous les éco-volontariats ne se valent pas. On t’explique les bails 👇
Cette envie d’engagement n’est pas passée inaperçue pour certaines organisations pas hyper honnêtes, et depuis les années 90-2000, les offres de « volontourisme » se sont multipliées.
France-Volontaires définit le volontourisme comme une « forme de tourisme conjuguant voyage et engagement volontaire, [qui] [...] promet à des individus désireux de s’engager pour une cause, la découverte de nouvelles cultures tout en venant en aide à des communautés locales ».
L’asso ajoute : « Si les intentions de départ paraissent louables, dans les faits, des organisations proposent des séjours payants dont le modèle économique repose sur les profits tirés de cet engagement volontaire, bien souvent au détriment de l’intérêt général. »
Clarisse Bourjon, responsable Reconnaissance et Valorisation chez France-Volontaires, explique qu’il s’agit d’une « marchandisation du secteur du volontariat » (qui par essence est censé être un échange non-monétaire, sans argent en jeu). Et au mieux ça n’a pas d’impact, au pire ça peut s’approcher de la traite d’être humains ou de l’exercice illégal de la médecine. Par exemple, des cas d’orphelinats qui n’en étaient pas vraiment 😳
« Et sociologiquement on peut s’interroger sur ces phénomènes, avec le concept du sauveur blanc par exemple » rappelle Clarisse → quand une personne occidentale veut apporter quelque chose lors d’une mission humanitaire ailleurs dans le monde, et en prime le montrer sur les réseaux sociaux… alors même qu’elle n’a pas les compétences nécessaires et que la mission accomplie n’est pas utile (même si elle en a l’apparence). Bref, c’est une vision néo-coloniale* des choses.
Pour Clarisse, les missions présentées comme écolo peuvent aussi mener à des dérives : « Je pense à la protection des animaux, où on peut avoir des missions pour apporter des soins aux animaux, sans qu’on nous demande des diplômes spécifiques, alors qu’ils sont pourtant nécessaires pour exercer. »
Même problème pour des missions comme par exemple creuser des puits. Chloé Sanguinetti, réalisatrice du documentaire The Volontourist et interrogée par Welcome to the Jungle, rappelait que tout le monde n’avait pas les compétences pour creuser un puits : « C’est extrêmement prétentieux, voire néo-colonialiste, de penser qu’on sera plus en capacité de construire un puits que les habitant·es d’un village, alors qu’on est dentiste. » 🤷♀️
Alors, tu dois laisser tomber toute envie de volontariat écolo ? Pas forcément, juste, fais attention en le choisissant. Voilà quelques conseils de Clarisse et de Bénédicte Halba, spécialiste du volontariat.
D’abord s’assurer du sérieux de l’asso que t’as choisie. Bénédicte explique qu’il faut enquêter : « Vérifier sur quoi l’organisation communique, s’il y a des articles qui en parlent pour avoir plusieurs sources, s’il y a des témoignages d’ancien·nes qu’on peut retrouver pour leur poser des questions… »
En gros chercher des informations sur l’association mais pas uniquement ce que l’asso communique par elle-même 🧐
Pour Clarisse, il faut se poser des questions recensées sur le site de France-Volontaires : est-ce qu’il y a des bilans disponibles pour comprendre comment la mission bénéficie à l’intérêt général, aux communautés locales, si tout cela a été mesuré correctement, etc …
Par exemple, s’il s’agit d’une mission scientifique pour recenser des animaux → Bénédicte conseille de demander à quel programme de recherche le projet est rattaché et s’il y a bien une université liée.
Et puis s’interroger sur soi aussi : « Il faut être sûr·e qu’on est entouré·e de professionnel·les de ce milieu-là, qu’on a les bonnes compétences, qu’on serait aussi ok d’exercer ces missions en France, parce qu’il n’y a pas de raison d’aller faire ailleurs ce qu’on ne veut/sait pas faire chez soi » rappelle Clarisse.
Il faut aussi se pencher sur la disponibilité du personnel de l’asso : est-ce qu’il y a une formation, un accompagnement au retour, est-ce qu’on peut poser toutes les questions dont on a besoin et obtenir des réponses claires ?
« Si l’association ne donne pas de réponses claires, c’est qu’elle n’est probablement pas fiable » résume Bénédicte.
Un dernier critère est le prix, et c’est un critère important. Il faut vérifier que le prix demandé est raisonnable au regard du coût de la vie dans le pays, et surtout ce qui va être fait avec l’argent donné 💸💸💸
Ce qu’en dit Bénédicte :
« Si on paie pour l’assurance et le voyage pourquoi pas, mais si on paie aussi sur place, c’est de l’arnaque. Surtout quand vous donnez de votre temps pour faire des choses concrètes : c’est plus du volontariat dans ces cas-là, c’est du tourisme. »
Et pour les contributions sous forme de dons pour l’organisation, « ça fait un peu mélange des genres, et c’est étrange » considère Clarisse. « Si vraiment on le fait, il faut s’assurer absolument de savoir où va cet argent. » Pour elle, le volontariat, ça doit rester quelque chose d’accessible !
Néo-colonial : Ce qui relève du néo-colonialisme, aka une poolitique menée par certains pays développés pour dominer, sous des formes nouvelles, des États indépendants du tiers monde qui étaient autrefois colonisés.
Interview de Clarisse Bourjon, responsable Reconnaissance et Valorisation chez France-Volontaires
Interview de Bénédicte Halba, spécialiste du sujet du volontariat
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