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Aujourd’hui : la parole à Amine (alias Zouzlaventurier sur Insta), un voyageur qui a décidé de se rendre au Maroc à pied depuis Bordeaux, en 2022, pour collecter de l’argent pour plusieurs orphelinats 🎒🥾
J’ai 25 ans et je suis éducateur dans des foyers pour jeunes placés à Bordeaux, où je vis depuis toujours. Je suis un adepte des road-trips en voiture : pendant mes vacances, je prends ma voiture et j’improvise des itinéraires. J’ai parcouru une partie de la France, de l’Italie, de l’Espagne, du Portugal et de la Suisse…j’aime bouger.
J’aime aussi beaucoup le sport et je voulais me lancer un défi, c’est pour ça que j’ai décidé de marcher jusqu’au Maroc, l’un de mes deux pays d’origine avec l’Algérie. Je n’y étais pas retourné depuis 7 ans.
Ce voyage était aussi un moyen de rendre hommage à mon père qui y a grandi. Pour y ajouter un côté humanitaire, j’ai mis en place une cagnotte alimentée par les gens qui me suivaient sur les réseaux sociaux en fonction de l’avancée de mon parcours. Quelques semaines avant mon départ j’ai cherché une asso avec qui j’allais m’allier pour reverser les fonds récoltés : je me suis rapproché de Kafala, une structure à Paris qui connaît des orphelinats au Maroc.
J’ai fait le choix de collecter des fonds pour des orphelin·es, parce que la cause me touche beaucoup : mon père a perdu le sien très tôt, alors il a dû s’occuper de toute sa famille très jeune. Je me suis dit que ça serait le meilleur moyen de lui rendre hommage.
J’ai choisi la marche pour être libre de me déplacer comme je le voulais. Avec un vélo par exemple, j’aurais eu un objet à transporter et ça aurait pu être contraignant : il y a sûrement des endroits où ça sera trop dur de le transporter. Du coup en marchant, j’ai une charge mentale en moins.
Entre le moment où j’ai eu l’idée de ce voyage et mon départ, il s’est écoulé 2 mois. J’ai fait une liste du matos dont j’aurais besoin et pour l’acheter, j’ai investi une partie de mes économies, mais j’ai aussi réussi à trouver des sponsors : par exemple, ma tente, c’est une entreprise de Paëlla qui l’a financée, parce que les dirigeant·es ont été touché·es par mon projet. Je ne voulais pas me surcharger, alors j’ai fait en sorte d’avoir un équipement très léger.
Pour me préparer physiquement, j’ai fait beaucoup de cardio, mais en soit je ne me suis pas entraîné tant que ça…et je l’ai bien senti le jour J !
J’avais pas pris en compte la douleur de marcher autant avec un sac à dos. J’ai parcouru 35 km et lorsque je me suis arrêté dans la petite ville du Bar, j'avais tellement mal que les larmes ont coulé toute seule. Je voulais abandonner. Mais lorsque j’ai pris le temps de regarder mes réseaux sociaux, j’ai vu qu’on m’avait envoyé tellement de force, que je ne me voyais pas arrêter, alors j’ai repris mon sac et j’ai cherché un endroit où dormir pour me reposer.
Les jours qui ont suivi étaient très durs mais mon corps s'est habitué peu à peu. J’ai trouvé ma cadence : en moyenne, je faisais 35km par jour en 7h à 8h de marche. Il y a des jours où j’ai pu faire 51km et mon record c’est 62 km.
Au début, dans ma tête, mon objectif était que la cagnotte se remplisse le plus possible, donc dans mon esprit il fallait que je prouve aux personnes qui me suivaient sur internet que ce que je faisais était incroyable.
Je ne pensais qu’à la performance sportive pour les rendre fiers.
Une rencontre a un peu changé ça. Un jour dans un village, je me suis fait interpellé par une personne qui suivait l'aventure sur les réseaux sociaux. Je ne me rendais pas compte de l’impact de mon voyage sur les gens. Alors je me suis dit que je ne profitais pas assez de ce voyage pour échanger avec les personnes que je croisais.
Cette réflexion est arrivée un peu tard, mais sur ma route j’ai rencontré tellement de monde, qu’humainement, ça amène un truc. Je m'arrêtais un peu plus, je tempérais plus la durée de marche.
J’ai aussi eu un moment très fort émotionnellement vers le milieu de la marche à Madrid.
Les gens que je connaissais de Bordeaux et qui me vannaient un peu en entendant parler de mon projet, commençaient à prendre conscience qu’en fait, j’allais peut-être atteindre mon objectif.
Des collègues d’une association bordelaise d’éducateur·ices spécialisé·es, que je connais, ont organisé un voyage vers Madrid avec des jeunes (que j’ai côtoyés en tant qu’éducateur) pour venir me voir.
C’était incroyable, on a profité de la ville ensemble, ça m’a ramené dans un cocon. On a ensuite marché 1 journée tous·tes ensemble, ça m’a fait tellement de bien et ça a redonné du sens à la marche.
Ce genre de moment, c'était important vu que parfois le voyage était très éprouvant, je dormais dans ma tente et parfois ça me saoulait de la déplier, donc je mettais un duvet dans un parc, sur le sol ou dans un stade de foot. Et la nuit dehors, tu ne dors pas beaucoup. J’avais bien préparé mon trajet, mais des fois ça ne se passait pas comme prévu. Mon objectif était d’arriver dans un village avant la tombée de la nuit ⛺
Côté budget, c’était serré. J’avais prévu 300 euros pour me ravitailler en nourriture pendant toute la marche. Je n’avais rien budgétisé mais je faisais attention à mes dépenses. Souvent j’avais de l’aide des habitant.es des villes où je passais. Plus je m’approchais de la fin, plus l’aventure c’était de la survie : ça m’est déjà arrivé de manger une pomme et de l’eau avant de me coucher.
J’ai aussi dormi dans des endroits extraordinaires, un peu désertiques j’avais l’impression que jamais personne n’y était passé, c’était incroyable de voir des paysages aussi sauvages, notamment dans le nord de l’Espagne.
J’espérais arriver dans une cinquantaine de jours et au final j’ai posé les pieds à Tanger au Maroc après 46 jours de marche. Si je devais le refaire, je ciblerais des villes-clé sur mon trajet.
Au total j’ai collecté 10 075 euros pour aider 4 orphelinats. Mon père m’a rejoint au Maroc et il était très ému. J’avais l’impression d’avoir accompli quelque chose de bien.
Ce voyage a changé ma vie, je me sens plus libre et léger, j’arrive plus à relativiser sur tout.
J’ai très envie de mener un nouveau projet dans ce style, peut-être sur un autre continent. Mon goût pour l’aventure a été multiplié par 100.
Je pense qu’il faut avoir un grain de folie pour faire un voyage comme celui-là, mais j'aimerais que tous·tes celles et ceux qui hésitent à se lancer dans l’aventure qui les fait rêver... osent !
Les conseils de Zouz l'aventurier pour partir à pied :
« On a vu des paysages qu'on n'imaginait pas en France métropolitaine. »
« J’ai voyagé en Égypte, au Soudan et en Ethiopie à vélo. »
« Ne pas tracer d’itinéraires précis, c’est ça qui fait la beauté du voyage. »
« Ces voyages m'ont fait changer d’orientation pro… et rencontrer l'amour. »
« Je me suis senti plus dépaysé dans la Creuse qu’à New York. »
« J’ai quitté mon job pour me lancer dans un tour du monde à pied et en stop. »
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