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La dissolution des Soulèvements de la Terre est annulée
Esther Meunier
Esther Meunier
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C'est l'info de la journée : la dissolution du mouvement des Soulèvements de la Terre vient d'être annulée par le Conseil d'État. Après une audience le 27 octobre, les juges ont finalement décidé de ne pas suivre la recommandation du rapporteur public ! Victoire pour ces activistes donc.
Ok alors si tout ça te semble un peu complexe, suis le guide, on t’explique.
Les Soulèvements de la Terre, c’est un mouvement qui rassemble une galaxie d’organisations et de personnes qui luttent entre autres contre l’accaparement des terres, l'artificialisation des sols, et pour une alimentation saine et accessible à toutes et tous.
Cette dernière année, les Soulèvements de la Terre ont organisé des manifestations et des actions contre la construction de méga-bassines dans le Poitou, contre la ligne TGV Lyon-Turin, contre la construction des autoroutes A133-A134 à Rouen et A69 dans le Tarn, contre le prolongement d’un téléphérique sur le glacier de la Girose, contre l’industrie du béton... Bref, le mouvement a bien fait parler de lui !
La dissolution du mouvement avait été annoncée par Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, le 28 mars 2023. Il accusait le collectif de « violences répétées, d’attaques contre les forces de l’ordre, d’appels à l’insurrection », suite aux manifestations à Sainte Soline contre les méga-bassines qui avaient donné lieu à de violents affrontements avec les forces de l’ordre.
Le 21 juin 2023, la dissolution était officiellement prononcée en Conseil des ministres en se basant sur la loi dite « Séparatisme », qui permet de dissoudre des assos ou des groupes « qui provoquent à des manifestations armées ou à des agissements violents à l'encontre des personnes ou des biens ».
En pratique, cette dissolution veut dire que les Soulèvement de la Terre n'étaient plus censés communiquer en leur nom propre, sans risquer des poursuites supplémentaires, et donc ne pouvaient plus appeler à se mobiliser, organiser des manifestations, ou autre 😬
Le truc c’est qu’évidemment les activistes des Soulèvement de la Terre étaient pas super d’accord avec cette décision.
Pour eux, dissoudre le mouvement revenait à criminaliser les activistes et en particulier la désobéissance civile : le mouvement estime n’avoir jamais appelé à la violence contre des personnes, tout au plus avoir saboté ou interrompu des travaux.
Il dénonçait aussi la manière dont ont été réprimées plusieurs de leurs manifestations, qui ont mené à des blessures graves comme celle du militant Serge, qui avait été plongé en coma artificiel à cause d’une blessure à la tête.
Donc un recours avait été déposé devant la justice et le 11 août, le Conseil d’État a suspendu cette dissolution. Ses raisons :
Pour résumer, il a considéré qu’il y avait un « doute sérieux sur la légalité » de cette décision, et qu’il fallait un examen plus approfondi avant de confirmer cette dissolution. Les Soulèvements de la Terre avaient donc pu reprendre leurs activités 🤷♀️
Mais cette suspension de la dissolution n’était bien qu’une... suspension. On attendait toujours la décision finale du Conseil d’État, qui devait examiner le dossier plus en profondeur.
Une audience « au fond » s’est tenue devant le Conseil d’Etat le 27 octobre dernier.
« Ce sont des questions très importantes qui sont débattues en matière de libertés publiques, de droit à la liberté d’expression, de droit à la liberté d’association. Pour nous, cette dissolution constitue une atteinte manifestement extrêmement grave [à ces libertés]. »
Me Sébastien Mabile, l’un des avocats des Soulèvements de la Terre
Pendant cette audience, le rapporteur public s’était prononcé en faveur de la dissolution.
Il considérait effectivement que la dissolution était « nécessaire » et « proportionnée » au regard « des actions violentes » que le mouvement « provoque ». Pour lui, cette violence place le collectif « en dehors du champ de la désobéissance civile » et « aucune cause ne justifie de porter atteinte à l’ordre publique », comme le rapportait l’AFP.
Mais il faut bien comprendre que ce n’est pas le Rapporteur public qui tranche : il donne un avis après avoir examiné le dossier, et ensuite ce sont les juges du Conseil d’Etat qui prennent la décision finale.
Et ils l’ont rendue ce 9 novembre : la dissolution du mouvement a été annulée définitivement. « Le Conseil d’État estime qu’aucune provocation à la violence contre les personnes ne peut être imputée aux Soulèvements de la Terre », a indiqué l’institution dans son communiqué. Elle a aussi considéré que « la dissolution des Soulèvements de la Terre ne constituait pas une mesure adaptée, nécessaire et proportionnée à la gravité des troubles susceptibles d’être portés à l’ordre public ».
Victoire pour les activistes donc 🤷♀️
Interview de Sébastien Mabile et Laure Abramowitch, avocat·es des Soulèvements de la Terre
Code de la Sécurité intérieure - Article L212-1
Les soulèvements de la Terre - Dissolution - Audience à risque pour les libertés publiques au Conseil d'Etat ! Rassemblement avec les Soulèvements de la terre
AFP - Soulèvements de la terre: le rapporteur public du Conseil d’Etat pour la dissolution
AFP – La dissolution des Soulèvements de la Terre entre les mains du Conseil d’État
France Info - Le Conseil d'Etat annule la dissolution du mouvement écologiste radical Les Soulèvements de la Terre
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