On parle d’un monde où on n’aurait pas à transformer nos habitudes pour préserver l’environnement. Un monde du « et si ». Comme « et si ce steak n’avait pas une empreinte carbone désastreuse ». Ou « et si les forêts absorbaient encore plus de CO2 ».
Plusieurs projets scientifiques essayent justement de transformer ce « rêve » en réalité. Enfin, en partie. Et pour ça, ils utilisent un élément hyper banal, mais en même temps super important : l’ADN.
Les vaches, et les ruminants en général, produisent un gaz à effet de serre pendant leur digestion : le méthane. Ensuite elles le rejettent : en rotant (surtout) et en pétant (un peu).
En soit, c’est pas un problème. Mais ça le devient quand l’élevage est pratiqué à très grande échelle.
Chaque vache ne rejette pas la même quantité de méthane que sa voisine 🐮💨 Sa production perso dépend d’une multitude de facteurs, comme son alimentation, mais aussi son patrimoine génétique*.
Didier Boichard, chercheur à l’Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (INRAE), travaille justement là-dessus dans le projet Methabreed.
Objectif du programme (à terme) → prédire le potentiel « émetteur de méthane » d’une vache laitière en analysant son ADN.
Quel intérêt ? Une fois cette relation établie, on pourrait prédire si un bovin est un futur gros ou petit émetteur → sélectionner les individus moins émetteurs → les privilégier au moment de la reproduction.
Appliquer cette logique pendant 10 ans permettrait de baisser de 7 à 10% la production de méthane par vache et par jour dans un élevage. Mais :
« Ça demande un investissement pour l’éleveur. Il faut qu’il y trouve un intérêt. Sinon, rien ne le poussera à choisir ce critère plutôt qu’un autre. »
Didier Boichard
Ce processus fait des plantes nos alliés dans la lutte contre le changement climatique. Mais il n’est pas parfait.
Le projet international RIPE, lancé en 2010 par l’université américaine de l’Illinois, veut modifier génétiquement les plantes pour booster la photosynthèse.
Avec comme conséquence (entre autres) un meilleur captage du CO2.
2 techniques pour arriver à ce résultat :
Pour ce dernier exemple, on te présente une nouvelle technologie : le forçage génétique. Grosso modo, c’est une modification génétique qui se transmet plus rapidement que la normale.
Cette solution intéresse le programme GBIRd (un partenariat d'universités, de gouvernements et d'ONG, géré par l’association Island Conservation).
Leur constat : environ 90% des îles sont envahies par des rongeurs (introduits par l’Homme), qui menacent la biodiversité locale 🐢
Après les pièges, la chasse, ou les drones, le forçage génétique serait une alternative pour supprimer ces espèces invasives → en modifiant leur ADN pour les rendre stériles par exemple.
Ces expérimentations basées sur la génétique soulèvent plein de questions.
Lors de la COP14 sur la biodiversité, en 2018, l’ONU a demandé aux États d’adopter une « approche de précaution » vis-à-vis du forçage génétique. Les êtres vivants modifiés avec cette méthode ne peuvent pas être dispersés sans l’accord des populations locales.
Ça n’a pas empêché la Floride d’accepter, en 2021, la libération d’animaux génétiquement modifiés sur son territoire.
En Europe, les organismes génétiquement modifiés* et les produits issus de « nouvelles techniques de sélection »* ne peuvent pas être vendus/disséminés sans autorisation. Mais les nouvelles techniques de sélection intéressent la Commission Européenne. La loi pourrait donc bientôt évoluer 🤔
Espèce invasive : Espèce introduite (volontairement ou accidentellement) par l’Homme, dans un territoire hors de son aire de distribution naturelle, et dont l’implantation et la propagation menacent les écosystèmes, les habitats ou les espèces indigènes. Les espèces invasives sont l’une des 5 grandes causes d’effondrement de la biodiversité mondiale.
Patrimoine génétique : Caractéristiques génétiques propres à un individu, dont il a hérité naturellement.
Organisme Génétiquement Modifié : Organisme dont le patrimoine génétique a été modifié de manière non-naturelle.
Nouvelles techniques de sélection : Ensemble de techniques qui permettent de modifier l’ADN d’un être vivant de manière ciblée.
INRAE
UICN
Nature - Self-destructing mosquitoes and sterilized rodents: the promise of gene drives
Nature - Photosynthesis gets a boost
CNRS - CRISPR-Cas9: des ciseaux génétiques pour le cerveau
Université de l’Illinois - Here is ultraphotosynthesis!
Genetic Biocontrol
New York Times - The Gene Drive Dilemma: We Can Alter Entire Species, but Should We?
COP14
Directive 2001/18/CE
Pollinis - Organismes génétiquement forcés: une autre dimension du génie génétique