Pourquoi le changement climatique va rendre les feux plus fréquents et violents

Les feux de forêt risquent de se multiplier à cause du changement climatique, en France mais aussi ailleurs en Europe et dans le monde. Pourquoi ?

Chaque année, le monde perd une superficie équivalente à celle de l'Union Européenne à cause des incendies, selon le dernier rapport Frontières du Programme des Nations Unies pour l'environnement. Entre 2002 et 2016, une moyenne de 423 millions d'hectares a été consumée par les flammes. L'Afrique est particulièrement touchée, représentant deux tiers de cette surface annuelle brûlée.

Quelles sont les causes des feux de forêt ?

En France, dans 9 cas sur 10, les incendies sont d'origine humaine, que ce soit par accident ou intentionnellement, explique Mathieu Regimbeau, ingénieur en Agrométéorologie et Feux de Forêt chez Météo-France. Bien que certains départs de feu puissent être attribués à la météo, comme les impacts de foudre lors d'orages secs, ces cas restent rares.

La météo n'est pas la cause directe des incendies. Cependant, elle influence leur propagation, leur étendue et leur durée à travers deux principaux facteurs :

  • La sécheresse de la végétation : des conditions chaudes et sèches rendent les végétaux plus vulnérables aux flammes.
  • La vitesse du vent : les rafales attisent les flammes (qui nécessitent de l'oxygène pour se propager) et les propagent plus rapidement.

Réchauffement climatique et feux de forêt : un cercle vicieux

Le changement climatique correspond à une augmentation globale de la température à la surface de la Terre, entraînant une série de conséquences telles que la sécheresse et les vagues de chaleur. Ces conditions réunissent davantage de facteurs de risque pour les incendies. Les forêts et la végétation en général deviennent plus sensibles aux feux.

En pratique, qu'est-ce que cela signifie ? "En France, le risque d'incendie ne sera plus limité essentiellement au Sud-Est et au Sud-Ouest, mais concernera l'ensemble du territoire d'ici le milieu du XXIe siècle", explique Mathieu Regimbeau. En 2050, une année record en termes de nombre d'incendies et de superficie brûlée, comme celle de 2003, deviendra une année normale. Les incendies futurs toucheront des zones moins habituées au feu, comme les forêts du nord de la France, et auront des conséquences potentiellement plus dévastatrices.

La saison des incendies risque également de commencer plus tôt (en mai au lieu de mi-juin actuellement) et de se prolonger jusqu'en octobre (au lieu de mi-septembre). Ainsi, en 2020, 3000 hectares de végétation ont brûlé en Corse en février !

Les incendies de végétation alimentent le réchauffement climatique. En brûlant, ils émettent du CO2 massivement, agissant comme un facteur aggravant du changement climatique. Ils fragilisent ou détruisent des écosystèmes cruciaux, tels que les tourbières, qui jouent un rôle essentiel dans la lutte contre le changement climatique (et qui, en disparaissant, libèrent tout le CO2 qu'elles ont stocké).

Quelles sont les conséquences de ces incendies ?

La destruction des écosystèmes, la pollution de l'air et de l'eau ont un impact majeur sur la biodiversité. La multiplication des incendies au cours des prochaines années pourrait menacer plus de 4000 espèces terrestres et d'eau douce. En Australie, les incendies de brousse de fin 2019 et début 2020 ont entraîné la migration et/ou la mort de 3 milliards d'animaux, dont 2,4 milliards de reptiles.

Les fumées et particules émises par les incendies affectent la santé humaine : troubles respiratoires, cardiovasculaires... Même vivant à des centaines de kilomètres, on peut être touché par ces impacts. Les incendies de végétation ont également un coût économique : destruction de logements, déplacement et relogement des habitants, pollution des cours d'eau, destruction des cultures...

Comment limiter l'impact des incendies de forêt ?

À l'échelle globale

Un rapport du Programme des Nations Unies pour l'environnement et du centre d’information et de données GRID-Arendal suggère de mieux préparer les mesures "avant" l'incendie (prévention, planification, adaptation…), souvent négligées par rapport aux moyens de lutte "après" l'incendie, qui reçoivent moins d'1% du financement total de la lutte contre les feux. Par exemple, construire des bâtiments à distance de la végétation ou créer et préserver des "zones tampons" entre les forêts et les habitations ou routes. 

Une autre piste serait de changer notre approche face au feu, par exemple en reconnaissant les connaissances des peuples autochtones, qui possèdent leurs propres méthodes de prévention et de gestion des incendies de forêt. Ils pratiquent volontairement des brûlages dirigés en début de saison sèche pour créer des "coupes-feu".

Il faut également maintenir la santé des forêts, en protégeant et restaurer des écosystèmes-clés, tels que les zones humides et les tourbières, et en préservant au maximum la biodiversité. Des expérimentations sont en cours en France pour mieux adapter les forêts aux conséquences du réchauffement climatique, en plantant par exemple des espèces végétales "du sud" habituées au climat chaud et sec dans des régions plus au nord.

À l'échelle individuelle

Quelques bons réflexes à adopter en pleine nature : ne pas jeter ses mégots de cigarette par terre, ne pas faire un barbecue au milieu de la forêt par temps venteux, ne pas bricoler sur une pelouse très sèche…