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Le changement climatique va provoquer des guerres ?

SONDAGE
Est-ce que le changement climatique provoque des guerres ?

Deux spécialistes sont là pour t’aider à y voir plus clair :

  • Sofia Kabbej, chercheuse à l’Institut de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS) et plus précisément dans le pôle Climat, énergie et sécurité
  • Erin Sikorsky, directrice du Centre pour le Climat et la Sécurité (CCS), et du Conseil Militaire International sur le Climat et la Sécurité (IMCCS)

Quel lien entre changement climatique et conflit ?

1ère chose à savoir d’après elles : il n’a encore jamais été prouvé que le changement climatique soit entièrement responsable d’un conflit. Mais ajouté à d’autres choses comme la situation sociale, politique, économique… ça peut contribuer à un cocktail explosif 😬

Une étude de l’université de Stanford qui croise les avis de multiples expert·es a conclu que 3% à 20% du risque de conflit était alimenté par le changement climatique = c’est une cause parmi d’autres.

Qu'est-ce qui déclenche ces conflits ?

Même s’il est difficile de comprendre précisément le lien changement climatique/conflits, on peut identifier des choses qui augmentent le risque d’escalade.

Risque n°1 : La raréfaction des ressources

Lorsque les ressources comme l’eau, les terres arables*, ou même l’énergie manquent, ça peut créer de la concurrence pour y accéder entre différentes populations. Le cas du Sahel est souvent cité :

« Les sécheresses ont affecté les activités agricoles, on a eu des éleveurs nomades qui ont dû changer leur routes de transhumance*, et qui empiètaient de plus en plus sur les terres occupées par des agriculteurs sédentaires. »
Sofia Kabbej

Si on ajoute à ça :

  • Un État absent de la zone
  • L’absence de mécanismes de résolution des conflits
  • Le recrutement des populations qui ne peuvent plus survivre grâce à leurs terres par des groupes extrémistes comme Boko Haram*

→ On a la recette pour un conflit

Risque n°2 : Le partage des ressources transfrontalières

Il y a aussi des inquiétudes sur des conflits entre États, qui se disputent des ressources partagées (eau, énergies fossiles…) 😰

Par exemple pour l’eau :

  • Jusqu’ici, des initiatives de coopération ont permis d’éviter les conflits autour du Nil, qui traverse de nombreux pays comme l’Egypte et le Soudan.
  • Dans les bassins fluviaux aux frontières Chine/Inde ou Inde/Pakistan, il est possible que les questions climatiques accentuent les tensions dans un contexte déjà compliqué.

Risque n°3 : Les phénomènes climatiques extrêmes

Dans des pays déjà fragiles et pas forcément capables de secourir leurs populations, des inondations ou des cyclones peuvent augmenter le risque de conflit. « En Afrique de l’Est, ces dernières années ça a été choc, après choc, après choc, avec des groupes extrémistes en plus », explique Erin Sikorsky.

« Donc quand on ajoute inondations et sécheresses, ça crée des tensions. En plus de ça, c’est plus difficile de revenir à la normale ensuite car tout l’environnement a changé, comme en Somalie par exemple. »

Risque n°4 : Les migrations

QUIZ
Combien de réfugié·es climatiques pourrait-il y avoir d'ici 2050 ?

Lorsque les gens ne peuvent plus survivre grâce à l’agriculture, beaucoup se déplacent en ville :

  • Des cultures différentes se rencontrent.
  • Il y a + de pression sur l’accès à l’eau et la nourriture.
  • Donc si une bonne réponse étatique n’est pas apportée ça peut escalader.

Risque n°5 : Les politiques d’atténuation

Même les politiques mises en place pour faire face au changement climatique peuvent être sources de tensions (sans que ce soit forcément des conflits armés). Sofia Kabbej prend l’exemple du mouvement des gilets jaunes en France : « C’était un mouvement qui s’opposait à la taxe carbone, une politique environnementale, mais qui ne prenait pas assez en compte le côté social : ça aussi ce sont des choses qu’on risque de voir se développer. »

Comment gérer les potentiels futurs conflits ?

QUIZ
Si on atteint les +2°C, le rôle du changement climatique pourrait :

Dans tout ça, il y a une bonne et une mauvaise nouvelle :

  • La mauvaise, c’est que parmi tous les risques que pose le changement climatique, les conflits armés ne sont pas les seuls, et pas les plus probables/importants (risques pour la santé, catastrophes climatiques, accès à la nourriture et à l’eau potable menacent déjà la sécurité humaine !).
  • La bonne, c’est que tout ça n’est pas inévitable !

Limiter les risques de conflit dûs au changement climatique : y a des solutions ?

Voilà quelques pistes pour éviter le pire :

  • Faire baisser dès aujourd’hui les émissions de gaz à effet de serre, pour limiter le changement climatique.
  • Coopérer le plus possible entre pays, car tout le monde est dans le même bateau et personne n’a intérêt à se battre.
  • Ça passe par fournir de l’argent aux pays les plus pauvres pour qu’ils puissent s’adapter et faire face aux dégâts qui arriveront inévitablement.
  • Poursuivre la recherche sur le sujet, car mieux on connaîtra ces mécanismes, mieux on pourra s’en prémunir !

Terres arables : Terres utilisables pour la culture et l’élevage.

Transhumance : Déplacements des troupeaux pour trouver eau et nourriture.

Boko Haram : Groupe extrémiste djihadiste qui agit surtout au Nigéria.

Réfugié·e climatique interne : Personnes contrainte de se déplacer à l’intérieur de son pays pour fuir les conséquences du changement climatique.

Interview d'Erin Sikorsky, directrice du Centre pour le Climat et la Sécurité et du Conseil Militaire International sur le Climat et la Sécurité
Interview de Sofia Kabbej, chercheuse à l’Institut de Relations Internationales et Stratégiques
IRIS - Les changements climatiques, multiplicateurs de conflits ?
ONU - Changements climatiques et conflits : inversement des rôles ou nouvelles tensions et inégalités ?
IMCCS - The World Climate and Security Report 2021
Stanford University - Stanford-led study investigates how much climate change affects the risk of armed conflict
Banque mondiale - D’ici à 2050, le changement climatique risque de contraindre 216 millions de personnes à migrer à l’intérieur de leur pays

Esther Meunier
À la recherche de bonnes nouvelles

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