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La chasse est-elle vraiment bonne pour la biodiversité ?
Esther Meunier
Esther Meunier
Depuis le début de la campagne présidentielle, aucun·e candidat·e n’a échappé à une question sur la chasse en interview 😳
Il y a les pro-chasse, comme Fabien Roussel, Eric Zemmour, ou bien Emmanuel Macron.
« Les chasseurs sont des acteurs de la ruralité. Un chasseur, il aime les animaux, il aime la nature. »
Emmanuel Macron
Et il y a celles et ceux qui pensent qu’elle devrait être limitée, à différents degrés.
Par exemple, Jean-Luc Mélenchon ou Yannick Jadot déplorent :
« Il faut sortir de cette situation qui détruit la biodiversité et entretient l’idée que tuer des animaux est un loisir légitime. »
Yannick Jadot
Le sujet est un peu complexe → Comme le dit Aurélien Besnard (chercheur au Centre d’Écologie fonctionnelle et évolutive du CNRS), « c’est devenu un sujet de société mais c’est aussi une vraie question d’écologie » 🤨
👉 Le premier argument des chasseurs pour affirmer qu’ils défendent la biodiversité, c’est d’expliquer qu’ils contribuent à préserver des écosystèmes en les entretenant.
Constance Bouquet, de la Fédération Nationale des Chasseurs, explique que « depuis toujours, les chasseurs se préoccupent des habitats des espèces, la chasse va durer 6 mois mais un chasseur va être sur le terrain pendant toute l’année ».
Par exemple, les chasseurs :
Tout ça contribue à la sauvegarde des espèces en leur fournissant des zones de protection, de reproduction, et d’alimentation.
Aurélien Besnard confirme que les droits de chasse, payés par les chasseurs (ainsi que leur temps bénévole), permettent de financer cet entretien → Mais ce n’est pas vraiment la chasse en elle-même qui a un effet bénéfique.
👉 Autre effet positif de la chasse pour la biodiversité selon les chasseurs, c’est de « gérer » les espèces pour qu’elles ne soient pas trop envahissantes.
Par exemple :
En gros, le chasseur jouerait alors le rôle de « grand prédateur » qui n’est plus joué par des animaux comme le loup, d’après Constance Bouquet.
Mais pour Dominique Py, si c’est en partie vrai que les sangliers peuvent tout piétiner (y compris des plantes, des nichées d’oisillons ou de petits mammifères), les bénéfices vont surtout aux activités humaines : l’agriculture intensive et l’agro-foresterie (= « culture » d’arbres) 😐
Et pour Aurélien Besnard, c’est se donner un rôle qui n’est pas nécessaire :
« On peut prélever par exemple en se disant : on enlève des renards pour favoriser les perdrix, mais la nature n’a pas besoin de la chasse pour se maintenir et trouver des équilibres. »
👉 Certaines pratiques liées à la chasse nuiraient carrément à la biodiversité pour Aurélien Besnard et Dominique Py.
Par exemple : des faisans, lièvres ou canards sont élevés et ensuite lâchés dans la nature, pour alimenter les populations d’animaux sauvages. Ces lâchers ont 3 principales conséquences néfastes pour la faune :
Autre exemple : l’agrainage (= le fait de nourrir des animaux sauvages) peut conduire à réunir beaucoup d’individus au même endroit et donc...
Constance Bouquet explique que les chasseurs surveillent finement les populations, pour ne pas « trop » chasser 🧐
« On a installé des radars pour compter plus précisément les populations, et on a un système pour déclarer en temps réel ce qui est chassé, et s’arrêter quand on a atteint le quota pour ne pas mettre l’espèce en difficulté. »
Malgré ça, Aurélien Besnard considère que la chasse, sans en être la seule responsable, contribue au déclin de certains oiseaux notamment 😞
« Pour les courlis*, les barges*, les chevaliers*, la chasse contribue au déclin, même si celui-ci est provoqué d’abord par la disparition des espaces naturels. Pour la tourterelle des bois par exemple, même si son habitat n’était pas détruit, la chasse seule ferait diminuer sa population. »
Certaines de ces espèces sont sur les listes rouges de l’UICN, mais comme elles ne sont pas qualifiées de « strictement protégées », la chasse est encore autorisée. Parfois, des moratoires ont été obtenus devant la justice pour suspendre la chasse, mais c’est temporaire.
Cervidés : Famille de mammifères ruminants qui comprend notamment les cerfs, les chevreuils, les rennes, les élans, les daims…
Courlis, barges, chevaliers : Espèces d’oiseaux échassiers vivant sur les rivages.
Rapport parlementaire - Restaurer l’équilibre agro-sylvo-cynégétique pour une pleine maîtrise des populations de grand gibier et de leurs dégâts à l’échelle nationale
Alternatives Économiques - Nature, fusil, lobby : enquête sur les chasseurs
Conseil d’État - Le Conseil d’État juge que plusieurs techniques de chasse traditionnelles des oiseaux sont illégales
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