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Et si on rationnait nos émissions de CO2 ?
Pauline Vallée
Pauline Vallée
Petite mise en situation : t’es à une station-service pour faire ton plein d’essence (oui, dans cette simulation, t’as une voiture à toi). Au moment de payer, tu dois sortir deux cartes : la première pour payer le prix de l’essence en euros, et la seconde pour payer le prix de ton plein… en crédits CO2.
Cette carte carbone fait (ou plutôt ferait, car aucune n’existe encore officiellement) partie d’un système où chaque personne se verrait attribuer un quota de CO2 → un équivalent de pollution qu’elle ne pourrait pas dépasser.
Chacun·e pourrait dépenser ses crédits CO2 autant qu’il ou elle le voudrait, jusqu’à épuisement de son stock, pour acheter de l’énergie (pétrole, gaz…) utilisée pour se chauffer/se fournir en électricité/se déplacer + éventuellement des produits dont la fabrication a émis une pollution (quasi tout quoi).
Si t’es en manque de crédits, tu pourrais aussi en racheter auprès d’autres personnes qui en ont en rab.
Comme on l’a dit plus haut, aucune carte carbone n’a été mise en œuvre pour l’instant.
Pour la petite histoire, l’idée est née dans les années 90 au Royaume-Uni. Une proposition de loi a même été soumise au Parlement britannique en 2004 avant d’être rejetée.
En France, aucun parti politique ne défend une telle mesure pour le moment. Dans une proposition de loi déposée en 2020, les député·es François Ruffin et Delphine Batho proposaient bien de créer un « quota carbone individuel » pour les voyages en avion (= une limite au nombre de voyages en avion que tu peux faire chaque année, en fonction de la distance des trajets, etc) → mais la mesure n’a pas été adoptée.
En faisant payer le prix « environnemental » d’un produit, en plus de son prix classique, le système de la carte carbone est un super outil de sensibilisation. « Devoir payer deux fois au moment de prendre de l’essence, en euros et en carte carbone, ferait prendre conscience de la quantité d’émissions rejetées » explique Antonin Pottier, maître de conférences de l’EHESS, dans son article Carte carbone : les arguments pour en débattre.
Ça t’inciterait à faire plus attention dans tes choix de conso pour ne pas te retrouver à court de crédit CO2 (et devoir dépenser encore de l’argent pour en racheter / ou devoir te passer de certaines choses).
Par exemple : « Le tissu urbain (centre-ville, banlieue, campagne) conditionne pour une large part la nature des trajets et les moyens de transport pour les effectuer. [...] À revenu donné, un ménage rural émettra plus qu’un ménage urbain » écrit Antonin Pottier. Qui conclut : « [...] Des plus riches gagneront au dispositif tandis que des plus pauvres y perdront. »
Spéculation : Profiter de l’instabilité du marché pour faire des opérations financières.
Socialter - Rationner, une décroissance dans l’égalité ?
Socialter - Une carte carbone pour nous rationner tous ?
Sandrine Rousseaux - Etat des lieux international des programmes de carte carbone individuelle
Antonin Pottier - Carte carbone : les arguments pour en débattre
Nature - Personal carbon allowances revisited
Transportation Research - Would personal carbon trading reduce travel emissions more effectively than a carbon tax?
Assemblée nationale - Proposition de loi N°3164
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