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Et si on affichait l'impact environnemental des vêtements ?

La mode, selon différentes sources, est responsable de 2 à 10% des émissions de gaz à effet de serre mondiales. Ça en fait donc un des trucs sur lesquels on peut agir directement pour réduire son propre impact sur la planète !

Mais bon, pas toujours facile d’identifier à quel point ce crop-top ou ce jean nuit vraiment à l’environnement. Surtout que le problème, c’est pas seulement les émissions carbone : y a tout plein d’autres impacts de la mode sur l’environnement (les produits chimiques, la consommation d’eau, la surproduction, etc).

Un affichage environnemental sur la mode, pour mieux comprendre ce qu’on achète ?

Pour mieux savoir où tu mets ton argent donc (💸💸💸), la Convention Citoyenne pour le Climat* avait recommandé la création d’un étiquetage environnemental (et pas seulement côté mode, l’alimentation est aussi concernée par exemple).

Depuis, la proposition a été reprise et renforcée avec la loi Climat et résilience → elle rend la création de cet affichage obligatoire, mais attention pas n’importe comment : en menant des expérimentations d’abord pour définir la meilleure méthode possible (parce que c’est quand même compliqué comme sujet).

Et ça fait plusieurs mois que ces expérimentations ont démarré : « 11 méthodologies ont été testées jusqu’en septembre 2022, par une quarantaine d’organisations » expliquent Chloé Linard et Ellie Dahan-Lamort, de la Fédération de la mode circulaire 🤓

Maintenant que ces expérimentations sont faites, c’est aux services de l’État et à l’ADEME de déterminer quelle méthode sera retenue et de publier celle-ci dans un décret. L’objectif, c’est de la mettre en place d’ici 2024 d’après Pascal Dagras, chef de projet affichage environnemental au Commissariat Général au Développement Durable.

Quels critères pour l’affichage environnemental mode ?

La méthodologie n’est donc pas encore fixée, ni la manière dont ce sera vraiment affiché, mais ce qu’on sait déjà, c’est quels critères seront intégrés à cet affichage environnemental.

La Ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, Bérengère Couillard, a annoncé en mars dernier qu’il y aura 8 critères 👇

À vue d’œil, c’est assez complet ! Quelques voix s’élèvent quand même dans le milieu de la mode dite « responsable » pour dire de faire attention à certains trucs 👀

Comment s’assurer que l’affichage environnemental sera vraiment utile (et écolo) ?

La durabilité physique, un critère à double tranchant

Marie Nguyen, de We Dress Fair, se demande par exemple comment sera utilisé le critère de durabilité : « Concrètement des fibres synthétiques comme le polyester peuvent être jugées plus résistantes que des fibres naturelles comme le coton ou la laine, alors que ce sont les plus polluantes tout au long de leur processus de fabrication, et que mélangées avec d’autres elles ne sont pas recyclables. »

Sur ce sujet, Pascal estime que « si le polyester est plus résistant que le coton, il faut en tenir compte ».

Mais que de toute façon ce ne sera pas tout calculé sur ce critère-là, d’autant plus qu’on ne se sépare d’un vêtement parce qu’il est usé que dans ⅓ des cas (les autres raisons étant souvent qu’il ne nous va plus ou qu’on s’en est lassé selon les données dont dispose Pascal) 👁👄👁

Comment juger la « fast-fashion » ?

À la Fédération de la mode circulaire, Chloé et Ellie s’inquiètent aussi au sujet du critère « fast-fashion » : « On se demande comment est-ce que ça va être pris en compte concrètement. Où est le seuil qui conduit une entreprise à être classée dans la fast-fashion ? »

C’est un débat important car le gros problème de la mode, et une des causes principales de son impact sur la planète, c’est le fait que les vêtements soient produits si vite et en si grande quantité, et durent toujours moins longtemps ☝️

Selon Pascal, cette question n’est pas encore tranchée mais l’idée est bien de mesurer les incitations à ne pas réparer les vêtements (ce qui a été proposé dans 1 des 11 propositions de méthodologies testées) et/ou les incitations à racheter du neuf (ce qui a été proposé par 5 méthodologies).

« On peut par exemple s’appuyer sur le nombre de collections : est-ce qu’il y en a 1 par saison ou est-ce qu’il y a 6000 sorties par jour comme chez Shein par exemple ? Il faut des critères objectifs et calculables. »

Comment articuler ces différents critères entre eux ?

Ce qui inquiète principalement en gros, que ce soit du côté de la Fédération de la mode circulaire ou chez We Dress Fair, c’est que la méthodologie ne soit pas suffisamment précise 😶

Pascal dit justement travailler à ça, en se basant sur les 11 méthodologies déjà testées, mais aussi sur :

  • La méthode européenne PEF certifiée avec 16 critères : « Le but étant d’élargir l’affichage environnemental à l’échelle européenne, ce sera plus simple si on part d’une méthode européenne. »
  • La méthode Ecobalyse, dont une première version est en accès libre : « C’est intéressant mais il manque certains critères comme le fait que les vêtements en matières synthétiques relâchent des microplastiques lors des lavages, ou le critère fast-fashion. »

Ce calculateur open source a l’avantage de montrer qu’on peut affiner les calculs. Par exemple, Marie s’inquiétait que le même nombre de points soient attribués sur la question du recyclage, peu importe si le vêtement contient 2% de matières recyclées ou 80%. Mais avec ce calculateur, on peut faire en sorte qu’un vêtement qui contient seulement 2% de matière recyclée soit moins bien noté que le même vêtement qui en contient 80%.

Reste à voir si c’est bien une méthode qui se rapproche de celle-ci qui sera retenue 🤷‍♀️

Comment afficher cette note écolo sur les vêtements ?

Mais même en faisant les meilleurs calculs possibles, à quoi ça sert s’ils ne sont pas compréhensibles par les gens qui vont acheter ces vêtements et se référer à ces scores ?

« Par exemple, si on choisit de noter les produits avec une lettre de A à E, il y a un risque de se dire qu’un produit noté A n’a pas d’impact, alors que tous les produits ont un impact. Celui-ci en aurait juste moins que les produits notés B, C, D ou E » estiment Chloé et Ellie.

Et si tout ça se résume à une lettre, comment savoir sur quels critères un produit est bien noté, et sur lesquels il l’est moins bien ? Dans les projets d’affichage sur lesquels travaille Pascal, certains contiennent un QR code qui pourrait permettre de voir le détail. Mais pas tous !

En résumé, l’intention est cool mais y a encore du boulot avant de parvenir à un affichage juste ET compréhensible… mais la tâche n’est pas impossible 😌

SONDAGE
Et toi, tu penses que cet affichage serait utile ?
Comment convaincre tes potes de renoncer aux collections green des marques de fast-fashion

Convention Citoyenne pour le Climat : Assemblée de citoyen·nes français·es tiré·es au sort pour débattre et recommander des mesures politiques face au changement climatique en 2019.

Interview de Marie Nguyen, de We Dress Fair
Interview de Chloé Linard et Ellie Dahan-Lamort, de la Fédération de la mode circulaire
Interview de Pascal Dagras, chef de projet affichage environnemental au Commissariat Général au Développement Durable
Ministère de l’Écologie - Mieux informer le consommateur : vers un affichage environnemental des vêtements pour indiquer leur impact
ADEME - Affichage environnemental dans le secteur des textiles d’habillement et chaussures : expérimentation 2021/2022
Fédération de la mode circulaire - Affichage environnemental sur les produits textiles en France et en Europe : où en sommes-nous

Esther Meunier
À la recherche de bonnes nouvelles

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