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5 alternatives aux pesticides pour une agriculture plus durable

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Un pesticide, c’est un produit dangereux pour :
  • Les champignons
  • Les mauvaises herbes
  • Les insectes

Certains sont employés pour protéger les cultures en éloignant les insectes et maladies, mais le problème avec les pesticides, c’est qu’ils peuvent aussi avoir des effets néfastes : ils contaminent les sols, l’eau et même l’air 😷 Par exemple :

  • Niveau biodiversité, pourtant indispensable : une étude du CNRS publiée en 2018 montre que la France a perdu 1/3 de ses populations d’oiseaux en milieu agricole en une quinzaine d’années seulement. Et ce qui est en cause, c’est notamment la disparition des insectes dont ils se nourrissent, eux-mêmes touchés par les pesticides ☠️🦋🐦☠️
  • Niveau santé humaine : en 2021 l’INSERM a actualisé ses données et conclut que l’exposition directe aux pesticides augmente le risque de développer certaines maladies (comme certains types de cancer par exemple)... auxquelles les agriculteur·ices sont particulièrement exposé·es.

La France s’est fixée plusieurs objectifs pour réduire l’usage des pesticides :

  • Le plan Ecophyto prévoit de réduire de moitié l’usage des pesticides d’ici 2025.
  • La loi d’Avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt indique que 50% des exploitations agricoles devraient aussi être engagées dans des démarches agro-écologiques d’ici 2025.

Mais concrètement, si on utilise des produits phytosanitaires, c’est parce qu’ils ont une utilité. Alors comment faire sans eux ? Focus sur 5 alternatives intéressantes 👀

Alternative n°1 : Installer des pièges olfactifs pour tromper les insectes

Penchons-nous d’abord sur le biocontrôle : un ensemble de méthodes de protection des végétaux basé sur l’utilisation de mécanismes naturels.

Plus précisément, on va s’intéresser en premier aux pièges olfactifs. C’est une technique assez innovante qui consiste à perturber les insectes avec des odeurs, comme l’explique Xavier Reboud, chercheur en agroécologie à l’INRAE de Dijon. Effectivement, de nombreux insectes utilisent ces dernières pour repérer les plantes qui les intéressent et/ou pour trouver leurs partenaires sexuels et se reproduire 🤭

Pour l’instant, cette technique est testée et commercialisée par la start-up Agriodor, grâce à des recherches effectuées à l’INRAE, par exemple pour éviter que les bruches (des coléoptères qui ressemblent à de petits scarabés) ne s’attaquent à la féverole, une légumineuse.

Quand on parle de pièges olfactifs, il y a quand même plusieurs méthodes :

  • Le monitoring : détecter la présence des insectes nuisibles grâce à quelques pièges pour mieux réagir.
  • Le piégeage de masse : dans le cas de certains papillons, attirer et tuer un max de mâles pour réduire la descendance.
  • La confusion sexuelle : saturer l’air de l’odeur qu’émettent les femelles. « Si on en émet assez au bon moment, ça va masquer pour les mâles l’odeur des femelles car ça donne l’impression qu’elles sont partout, et donc ils ne peuvent pas produire de descendance » explique Xavier Reboud.

L’un des avantages est que ça ne touche que les espèces ciblées et pas les autres, contrairement à beaucoup d’insecticides qui s’attaquent aussi bien aux insectes parasites qu’aux insectes qui ne nuisent pas aux cultures. En plus, c’est local : dans le cas de la confusion sexuelle, les insectes peuvent continuer de se reproduire ailleurs que sur la zone ou on a diffusé d’odeurs.

Inconvénient : « Peu importe la manière dont on enlève un organisme de l’environnement, ceux qui s’en nourrissent vont en pâtir, par exemple éradiquer les moustiques ça peut nuire aux hirondelles, mais l’espoir c’est que ça se fasse de manière plus ciblée et moins aveugle que l’utilisation des pesticides » d’après Xavier Reboud.

Alternative n°2 : Influencer le microbiote

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À ton avis, c’est quoi un holobionte ?
  • Un hologramme écolo
  • Un concombre de mer
  • Un être vivant et sa cohorte de micro-organismes

Encore une technique de bio-contrôle : manipuler des micro-organismes ! Soit pour induire des maladies chez les ravageurs ; soit lorsqu’il s’agit par exemple de micro-organismes qui vont coloniser les plantes (saturer la plante de micro-organismes non-nocifs pour qu’il n’y ait plus de places pour ceux qui le sont).

C’est pas clair ? Xavier Reboud a une super métaphore :

« En gros, il faut s’imaginer le micro-organisme nocif pour la plante comme un baigneur avec sa serviette de bain, qui cherche une place sur la plage : on l’empêche de se poser sur la plage en mettant une foule d’autres baigneurs qui ne sont pas nocifs dessus à sa place. »

Les scientifiques connaissent des micro-organismes favorables à certaines cultures, qui pourraient être efficaces. Ça pourrait par exemple être mis en place au moment de la mise en terre des semences, pour protéger celles-ci et qu’elles germent comme il faut.

Inconvénient : pour l’instant, c’est encore expérimental, même si Xavier Reboud est confiant. « On va beaucoup progresser, d’ici 5 à 10 ans on sera capable de remplacer les fongicides qui enrobent les semences de blé par des communautés microbiennes qui rendent le même service. »

Alternative n°3 : Sélectionner les plantes résistantes aux maladies

Méthode ultra-ancienne (mais au final c’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleures confitures n’est-ce pas) : la sélection génétique.

En agriculture, cette pratique consiste à sélectionner et à faire se reproduire des plantes/animaux qui ont des caractéristiques particulières (par exemple : d’une certaine taille, résistante à des maladies…) pour créer de nouvelles variétés/espèces qui auront ses avantages. Pour celles et ceux qui jouent à Animal Crossing : c’est exactement ce que tu fais dans le jeu pour avoir des fleurs avec des couleurs spéciales 🌼

⚠️ Ce n’est pas la même chose que les OGM : on ne modifie pas directement le patrimoine génétique d’un être vivant, mais on sélectionne/croise pour faire évoluer ce patrimoine génétique pour essayer d’obtenir un certain résultat.

En quoi ça peut remplacer les pesticides ? Prends la vigne : en moyenne une vigne française reçoit 13 traitements phytosanitaires, explique Xavier Reboud (contre des champignons par exemple). « Mais il existe des variétés de vigne moins sensibles voire insensibles à certaines maladies comme le mildiou et l'oïdium » → plus besoin de traitement contre ça !

Inconvénient : c’est un peu une course contre la montre contre les maladies, qui s’adaptent sans cesse pour infecter des variétés jusque-là immunisées.

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C’est déjà le cas avec…
  • La pomme Golden 🍎
  • La banane Cavendish 🍌
  • La fraise Gariguette 🍓

Alternative n°4 : Diversifier les cultures

Autre méthode vieille comme le monde : rendre le milieu imprévisible en évitant de cultiver une seule et même plante sur une parcelle agricole. Ça peut être :

  • Semer un mélange de variétés dans un champ (en incluant des variétés anciennes/locales, des semences paysannes, etc).
  • Semer différentes espèces dans un champ, mélangé sur un rang, ou en alternant les rangées (avec par exemple un mélange de céréales comme le blé et des légumineuses comme les pois).
  • Planter des végétaux ailleurs, via l’agroforesterie (aka associer les culture avec des arbres, comme des arbres fruitiers 🍑).
  • Changer régulièrement le type de culture sur une seule et même parcelle (on appelle ça la rotation des cultures).

L’avantage, c’est que quand des maladies/des ravageurs débarquent, les différentes plantes ne seront pas toutes forcément vulnérables aux mêmes choses, et l’agriculteur·ice a moins de risque de perdre toute sa récolte d’un coup.

En gros, l’illustration de l’expression « ne pas mettre tous ses oeufs dans le même panier » (oui, on aime les phrases de vieux chez NOWU, ET ALORS).

Inconvénient : ça produit de plus petits volumes, donc moins efficaces et économiques qu’une grosse monoculture standardisée. « La compétitivité des filières peut dépendre de la capacité à avoir une production homogène et standardisée, appuie Xavier Reboud. C’est typiquement là qu’on pose le curseur entre “c’est OK d’utiliser des pesticides” et “on en utilise pas mais ça coûte plus cher”. »

Alternative n°5 : Faire appel à des plantes et insectes alliés

Entre plantes, ou entre plantes et insectes, parfois on se chamaille, mais parfois aussi on se serre les coudes 🤝 Planter certaines plantes ou attirer certains insectes peut aider à protéger des cultures (c’est même un des principes de la permaculture).

Côté insectes, ces alliés peuvent :

  • Manger les ravageurs (pour continuer avec les expressions old school, « les ennemis de nos ennemis sont nos amis »). Un des exemples les plus connus des jardinier·ères est d’utiliser les larves de coccinelle pour combattre les pucerons 🐞
  • Aider à la reproduction de certaines plantes dans le cas des insectes pollinisateurs* comme les abeilles.

Côté plantes, ces alliées peuvent :

  • Faire obstacle aux mauvaises herbes ou aux ravageurs parce que, ben, elles prennent de la place.
  • Repousser les insectes en sécrétant des substances.
  • Attirer les insectes, qui vont préférer s’attaquer à elles plutôt qu’aux cultures (un tel sacrifice, c’est beau 🥲).
  • Attirer les « bons » insectes qui vont ensuite protéger les cultures (cf ci-dessus).

(voilà d’ailleurs un petit tableau pour repérer quelles plantes associer entre elles)

Inconvénient : « Cette méthode est efficace mais incompatible avec l’utilisation de pesticides. Donc si vous n’avez qu’un seul ravageur dans votre exploitation ça peut marcher, mais si vous en avez plusieurs dont certains qui ne peuvent être tués qu’à l’insecticide, ou que votre voisin·e utilise des insecticides sur ses parcelles par exemple, ça ne sert à rien de lâcher des coccinelles car les produits vont les tuer » explique Xavier Reboud.

Et voilà 5 solutions pour une agriculture plus durable

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Pollinisateur : Désigne les insectes, en particulier les abeilles, bourdons ou papillons, qui en butinant les fleurs pour se nourrir vont transporter du pollen d'une fleur à une autre, ce qui va lui permettre de se reproduire.

Interview de Xavier Reboud, chercheur en agroécologie à l’INRAE de Dijon
CNRS - Where have all the frambirds gone?
INSERM - Pesticides et santé : nouvelles données (2021)
INRAE - Le biocontrôle
INRAE - Protéger les cultures en augmentant la diversité végétale
Ministère de l’Agriculture - Plan Ecophyto 2+
INRAE - Agriculture compétitive et durable : les apports croissants du biocontrôle
INRAE - Une agriculture européenne sans pesticides en 2050 ?
Kew Royal Botanic Garden - Cavendish Banana
BBC - ​​The imminent death of the Cavendish banana and why it affects us all

Esther Meunier
À la recherche de bonnes nouvelles
Pauline Vallée
Voisine de Totoro